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  • « Don’t Look Up »

    Valérie Masson Chercheuse en sciences du climat, directrice recherche CEA

    Valérie Masson - Facilities, site du Facility management

    Comme beaucoup, j’ai regardé le film Don’t Look Up : Déni cosmique, avec Jennifer Lawrence et Leonardo DiCaprio, diffusé sur Netflix.

    Le réalisateur Adam McKay y mêle «l’absurde et le comique», pour faire réfléchir sur notre capacité à agir face à une menace grave, et souligner la nécessité de «la prise de conscience, la volonté et l’action».

    J’aimerais partager ici les réflexions que ce film m’a inspirées, en tant que chercheuse en sciences du climat.
    Cette sombre satire joue de ressorts classiques (transposition, exagération) pour dénoncer une mascarade sociale empreinte de déni, de vanité, de cupidité et de perte du sens de l’intérêt général.
    Le personnage de Kate Dibiasky – la jeune doctorante qui découvre la comète et réalise qu’elle se dirige tout droit vers la Terre – m’a particulièrement touchée, par sa capacité à se remettre en question mais aussi par son désespoir de ne pas réussir à faire mieux., Ce sentiment de vivre une tragédie grecque annoncée, sans jamais voir arriver le sursaut ni le leadership nécessaires.
    Cela montre le décalage, que j’ai souvent ressenti, entre la recherche scientifique, les médias et le pouvoir politique.
    Le film met aussi l’accent sur les individus et le pouvoir (le sommet de l’État, la télévision, les milliardaires de la tech), au détriment de tout ce qui fait la société, notamment les organisations collectives et les mécanismes de solidarité.
    Ainsi, particulièrement gratiné, le personnage de Peter Isherwell, milliardaire de la tech, qui convainc la présidente des États-Unis de retarder une action faisable immédiatement pour détourner la comète. Il impose de fausses bonnes «solutions» technologiques à son profit, pour lui permettre d’exploiter les minéraux rares que contient la comète.
    Ce film illustre bien les travers de la société du spectacle et de la surconsommation, la manière dont fonctionnent certains médias, la désinformation qui se propage plus vite que les connaissances solidement établies.
    Je terminerai en me demandant si ce film touche un public plus large, ou est-ce une distraction qui fait porter le débat sur le film et non sur les problèmes de fond ? Je note en tout cas que mes commentaires concernant ce film, postés sur Twitter, ont généré davantage de réactions en un seul jour que mon résumé du rapport du GIEC de cet été en près de cinq mois !